320 miles en 69,5 heures

En route pour les Baléares
En route pour les Baléares

Avec peu ou prou la même moyenne horaire que pour venir de Port-Camargue à Barcelone, nous avons rallié Carthagène via les Baléares avec des conditions alternativement excellentes et médiocres. Excellentes lorsque le vent soufflait à 10-15 noeuds sur une mer presque plate et médiocres lorsque nous avons été ballottés sans vent dans des vagues de 2 mètres, c’est à dire une houle du sud résultant d’un violent coup de vent sur les côtes nord-africaines.

féérie lunaire
féérie lunaire

Résultat : moteur ! Les 10 dernières heures, nous avons eu du bon vent à 20 noeuds avec une mer un peu creusée, mais dont l’onde allait presque dans le même sens que nous. Des conditions idéales pour Azymuthe.

Notre première idée était de partir sur Minorque et de nous arrêter pour une courte visite, mais après avoir consulté la météo, nous avons décidé de descendre presque plein sud vers Ibiza. D’autre part, en regardant une carte générale de la Méditerranée occidentale, nous avons pris conscience que d’aller à Minorque nous faisait « reculer » jusqu’à la longitude de Port-Camargue. Or, le but est quand même de faire de l’Ouest, ce que nous avions commencé en allant à Barcelone. Il y a aussi le fait que nous avons pris pas mal de retard avec nos problèmes d’échappement et que, même plus au sud, l’automne est également arrivé. Les nuits sont donc fraîches, mais surtout, les conditions de vent ont changé. Alors qu’en été la tendance est souvent à des vents d’Est, il y a une bascule de dominante Ouest en octobre-novembre pour la zone des Baléares et de la mer l’Alboran. Comme nous souhaitons arriver si possible aux Canaries assez rapidement, nous avons donc fait l’impasse sur les Baléares.

Lever du jour entre Barcelone et les Baléares
Lever du jour entre Barcelone et les Baléares
Pleine lune

La magie de la mer, c’est aussi le paysage. La couleur de l’eau change souvent en fonction de la lumière, de la hauteur des fonds et du vent qui la modèle. A mesure que la journée passe, puis la nuit, nous découvrons un ciel en perpétuel changement. La course des nuages dans un azur d’une pureté rarement visible à terre, à cause de l’activité humaine (terme de novlangue pour parler de la pollution), les levers de lune lorsque le temps n’est pas à la grisaille, et bien entendu, les levers et couchers de soleil. Ce billet contient quelques images, vous pouvez admirer le reste dans la nouvelle rubrique « galeries » qui contient également des photos de Barcelone, port et ville.

Lever de soleil aux Baléares
Lever de soleil aux Baléares

Nous nous habituons gentiment au rythme de la navigation, ces presque trois jours sans voir un ponton nous ont permis de nous mettre dans le temps long propre à l’aventure vélique.

  • Dis, y m’semble que le vent tourne, on fait quoi, on vire de bord ?
  • Bah, faut voir, on est où exactement ?
  • A 80 miles de la côte.
  • Bon, alors on attends encore deux heures et on vire. Tu veux un café ?
  • Je sais pas trop, j’ai un p’tit creux, on se mange quelque chose ?
  • C’est quelle heure ?
  • Quelle importance ? si t’as faim, on mange.
  • Ok, alors je borde un peu le génois et on se grignote un truc.
  • D’accord, pendant ce temps, je regarde la météo.
Pascal au soleil
Pascal au soleil

Au niveau des quarts, on a repris notre rythme de la première étape. Pascal va plutôt dormir tôt et je reste de veille jusque vers 2h du matin et ensuite Pascal reprend jusqu’au lever du soleil. Nous partageons généralement un café ou un thé, parfois une collation et ensuite Pascal va se reposer jusque vers midi. Dans l’après-midi, c’est moi qui faire une sieste de quatre heures environ et je reviens pour assister au coucher du soleil. Ce sont deux moments privilégiés que nous partageons ensemble, souvent en silence, tant ce que nous avons sous les yeux se passe de commentaires.

Danse avec les nuages
Danse avec les nuages

C’est un temps propice à une certaine introspection, au vagabondage de l’âme, à mesure que ses premiers rayons embrasent l’horizon, réchauffent l’atmosphère et adoucissent le vent qui caresse mon visage et mes mains. Je fais le plein d’énergie, j’ai littéralement l’impression de me recharger, je sens la fatigue quitter mon corps à mesure que le soleil pâlit et monte dans le ciel. J’ai une pensée pour ma mère, pour mes proches, j’ai parfois le sentiment qu’ils sont encore plus proches de moi, malgré l’éloignement géographique qui grandit chaque jour.  Je soupçonne Pascal de se livrer à la même chose de son côté, même si, évidemment, je ne suis pas dans sa tête et son coeur.

Magie solaire
Magie solaire

A l’inverse, le coucher du soleil et la venue de la nuit m’apaisent, me permettent de relativiser les quelques énervements de la journée (satané Eole qui n’en fait qu’à sa tête !) et me ramènent à ceux qui sont restés à terre. Où sont-ils, que font-ils, sont-ils gais ou tristes, partagent-ils cette même magie crépusculaire ou sont-ils occupés à autre chose ? Puis il y a ces quelques heures où l’obscurité s’est installée et où je vais me coucher sur le pont afin de contempler la voute céleste dans le noir complet. Au large, pas de pollution lumineuse, le premier réverbère est à des dizaines de kilomètres et tant que la lune n’a pas montré le bout de son nez, on peut vraiment profiter de cette infinité stellaire. Enfin, la lune vient teinter le ciel, jouer avec les nuages à l’horizon et redonner du relief à la mer, reflets irisés sur l’immensité noire. C’est le moment d’aller se faire un thé ou un café et éventuellement de manger un morceau.

Rencontre maritime
Pascal prend la météo
Pascal prend la météo

Lorsque nous avons décidé de passer tout droit aux Baléares, nous avions prévu d’aller jusqu’à Almeria, soit une bonne centaine de miles plus loin que Carthagène d’où je vous écris. Mais après discussion et observation des prévisions météo, nous n’étions pas sûrs de pouvoir arriver à Almeria sans se prendre une « branlée » comme l’énonce avec délicatesse la sagesse des pontons. Avec le recul (on est toujours bien plus intelligent a posteriori), nous aurions pu rejoindre Almeria sans problème, mais comme, selon Pascal, y a rien à voir et à faire là-bas, on est très heureux d’avoir bifurqué sur Carthagène. Nous avons été très bien reçus et en français à la capitainerie du lieu, nous sommes bien à l’abri dans le port et à trois minutes du centre historique de la ville. Et ce, pour un prix à la nuitée trois fois inférieur à celui de Barcelone ! Si nous ne sommes plus véhiculés par les voiturettes de golf le long des quais et reçus par des beautés en uniforme, nous y avons gagné un wifi fonctionnel, un sourire éclatant et plein d’infos concernant les lieux utiles ou à visiter de la ville.

Le terminal pétrolier de Carthagène

Depuis hier, ça souffle à décoiffer le brushing d’un politicien en campagne électorale ! On est bloqué ici jusqu’à mercredi au moins, mais quitte à être coincés, autant l’être dans une ville sympa où il y a des choses à visiter. Ce sera l’occasion d’un autre billet. Pascal vient de servir l’apéro, c’est sacré, et après, on va manger quelque chose de bon sur le port. A bientôt.

4 thoughts on “320 miles en 69,5 heures

  1. waouwwww, quel plaisir de trouver à lire en se levant le matin, alors qu ici c est la purée de pois!!je ne vois même plus Esta lol

    Merci aussi pour les plus que magnifiques images qui non seulement font rêver, mais être un peu avec vous à distance!!

    Bon séjour à Carthagène, bisoussssssssss

  2. Coucou matelots! Quel plaisir de petit-déjeuner avec le soleil et les couleurs de tes magnifiques photos, Oli… Ça réchauffe par rapport au triste temps qu’il fait ici. Dis à Pascal qu’il prenne l’appareil de temps en temps, qu’on voie ta binette aussi, mdr 😉
    A tout bientôt et bon vent ! Bisous

  3. Hey les matelots ! Merci pour ces magnifiques photos et commentaires enchanteurs ! Nous sommes en vacances à la Gomera, (Canaries) plus précisément à Playa Santiago et ce serait super génial que vous feriez escale ici… Bons vents à vous deux et à très bientôt !

  4. Que du bonheur pour les yeux, on voyage avec vous sans tanguer.
    Images féériques. Continuez à nous faire rêver les gars. Je ne capte pas l’histoire des noeuds mais je t’en envoie 20 sous forme de bises……Soyez prudents

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